Réussir ses visites de sécurité terrain

La visite de sécurité terrain a un objectif opérationnel et un objectif managérial.

Il est présenté dans l’introduction de cet article : il s’agit de faire un constat du fonctionnement d’une activité sur le terrain pour en tirer des actions de progrès du système de management de la sécurité.

En effet, la visite permet de s'assurer que l’organisation de l’entreprise et ses procédures de sécurité sont respectées, d'identifier les risques potentiels pour la santé et la sécurité des employés et de proposer des améliorations pour renforcer la culture de sécurité de l'entreprise.

Les écarts et problèmes rencontrés sont analysés pour en tirer des actions de progrès.

Ce second objectif est de montrer l’engagement de la direction de l’entreprise : en se déplaçant sur le terrain, les représentants du management montrent l’intérêt qu’ils portent à la sécurité de leurs collaborateurs.

Dans le référentiel MASE, l’engagement de la direction de l’entreprise est d’ailleurs le premier axe du référentiel et l’exigence 1.1.6 évalue l’engagement personnel de l’employeur en fonction de sa participation aux animations SSE, dont font partie les visite de sécurité terrain.

Enfin, dans le cadre d'une intervention d’une entreprise intervenante au sein d’une entreprise utilisatrice, on peut avoir plusieurs types de visite de sécurité terrain :

• L’entreprise utilisatrice peut réaliser une visite de sécurité terrain pour observer les pratiques de son entreprise sous-traitante.
• Le management de l’entreprise intervenante peut de son coté réaliser une visite de sécurité terrain pour montrer son sérieux dans la prise en compte de la sécurité et s’assurer des bonnes conditions d’intervention de ses équipes.
• Lorsque entreprises utilisatrice et intervenante partagent la même ambition en matière de culture sécurité, une bonne pratique consiste à réaliser des visite de sécurité terrain en commun.

Le principe est simple : au cours d’une visite de sécurité terrain, les membres du management rencontrent les travailleurs sur le terrain, observent leurs pratiques et discutent avec eux. Ils peuvent également inspecter les équipements de travail mis en œuvre, qu’il s’agisse d’engins de chantier, d’outillage ou de protection collectives.

Si dans l’esprit des collaborateurs la visite de sécurité terrain est associée à une crainte de signalement d’écarts, voire de sanctions, elle doit aussi permettre d’identifier les bonnes pratiques et de les valoriser. Nous reviendrons sur ce sujet de l’attitude à avoir dans la suite de l’article.

Le « terrain » peut être n’importe quel lieu de travail mais il s’agit en général de chantiers, où les configurations d’intervention sont très variées et nécessitent une adaptation permanente pour garantir la sécurité des travailleurs.

La visite de sécurité terrain est différente d’une visite simple : elle a un objectif d’évaluation des pratiques mises en œuvre qui concourent à la sécurité, contrairement à la visite simple où l’objectif est d’observer l’avancement d’un chantier. Elle est aussi différente d'un audit chantier, qui aborde un grand nombre de points très précis sans avoir la dimension humaine de la visite de sécurité terrain.

La visite de sécurité terrain peut être réalisée par tous les niveaux du management de l’entreprise : du responsable d’affaires ou conducteur de travaux à la direction d’une entreprise, en passant par la filière prévention.

Dans les entreprises avec plusieurs niveaux d’encadrement et de management, il est essentiel que toute la ligne managériale réalise des visite de sécurité terrain, jusqu’aux membres de la direction générale pour les grandes entreprises.

S’il est certain qu’en étant prévenus, les travailleurs feront en sorte que la visite de sécurité terrain se déroule correctement, réaliser des visite de sécurité terrain à l’improviste peut donner une mauvaise impression aux travailleurs.

D’une manière générale, prévenir à l’avance des visite de sécurité terrain permet d’entretenir le nécessaire climat de confiance entre le management et les collaborateurs. Nous y reviendrons aussi dans la suite.

En réalité, une équipe avec de trop mauvaises pratiques ne pourra en général pas cacher une mauvaise organisation : soit le fait d’être prévenu de la visite de sécurité terrain permet à l’équipe de bien s’organiser et dans ce cas, il s’agit d’une incitation à progresser, soit elle n’en est pas capable et dans ce cas le fait de prévenir ou pas à l’avance ne change rien.

La partie qui suit est sans doute une des plus essentielles pour une visite de sécurité terrain vraiment efficace : si vous n’échangez pas avec les bonnes personnes, vous aurez l’impression d’avoir réussi votre visite de sécurité terrain, mais elle ne représentera peut-être pas parfaitement la réalité !

En effet, si la tendance naturelle du manager va être d’échanger avec le chef de chantier ou le responsable d’affaires qui l’accueille, cette tendance a un biais majeur : le discours du chef de chantier sur le sujet de la sécurité sera sans doute parfaitement rodé !

Il est donc indispensable d’échanger avec :

• le chef d’équipe, présent en permanence sur le chantier
• les autres travailleurs du chantier

Le chef d’équipe, contrairement au chef d’entreprise, au préventeur ou au chef de chantier est présent en permanence sur le chantier : c’est donc lui qui peut être le garant de la sécurité du chantier. En cas de mauvaise pratique, c’est lui qui sera présent pour revenir à une situation normale.

Il doit être interviewé de façon privilégiée pour mesurer sa perception de la sécurité.

Il est indispensable de trouver des moyens d’avoir un échange direct avec les autres travailleurs, par exemple lorsque le chef de chantier sera dérangé par un appel téléphonique !

Echanger avec les autres travailleurs du chantier permettra aussi de montrer que vous vous intéressez à leur travail et à leurs conditions de travail.

Au début de la visite de sécurité terrain, il est d’usage de demander l’accord du chef de chantier pour échanger avec les intervenants sous sa responsabilité, surtout si vous réalisez une visite de sécurité terrain d’un sous-traitant.

Une bonne attitude est essentielle pour réaliser dans la durée des visite de sécurité terrain réussies.

D’abord, vous devez être exemplaire et donc respecter les règles et procédures en vigueur sur le chantier, par exemple le port de l’ensemble des EPI requis, même si vous n’êtes pas là pour travailler sur le chantier.

En montrant l’exemple, vous inciterez vos collaborateurs à respecter les règles de l’entreprise.

Vous devez avoir une attitude « juste » :

• posez des questions pour comprendre le fonctionnement et les situations : tout ne peut pas être appréhendé par la simple observation visuelle ;
• soyez factuel dans l’ensemble des constats réalisés, notamment pour signer des écarts ; n’émettez pas de jugement sur les constats réalisés ;
• signalez et valorisez les bonnes pratiques observées ;
• partagez l’ensemble de vos appréciations en direct avec le personnel présent : il est très désagréable pour des travailleurs de découvrir des observations (notamment négatives) dans le rapport de la visite de sécurité terrain ou par l’intermédiaire du chef d’équipe ;
• demandez à voir les documents évoqués par les collaborateurs (plan de prévention, modes opératoires, certificats de VGP d’équipements, habilitations, rapport de causerie…) ; la réalité est parfois « embellie » oralement ! A défaut de pouvoir consulter ces documents, creusez les sujets en posant des questions complémentaires.

Vous l’avez compris, vous devez trouver un subtil équilibre entre une attitude ferme (vous représentez la direction de l’entreprise et devez faire appliquer les règles en vigueur) et une vraie volonté de compréhension des situations observées et de démarche de progrès sincère et bienveillante.

Si votre attitude habituelle lors des visite de sécurité terrain est perçue comme trop ferme, vous pourriez rencontrer les deux comportements suivants :

• Le « chantier mort » le jour de la visite de sécurité terrain : les équipes, par crainte de reproches, ne réalisent aucune activité à risque le jour de la visite de sécurité terrain ; l’intérêt de la visite de sécurité terrain dans ce cas est beaucoup plus limité : vous avez perdu votre temps.
• Le « silence organisationnel » : par crainte de reproches, les collaborateurs avec qui vous discutez ne vous donnent que minimum d’informations utiles, voire cachent les informations « génantes ». Votre perception de la réalité est donc faussée.

A vous de trouver le bon dosage !

Même s’il ne faut pas avoir une attitude trop ferme, un des objectifs des visite de sécurité terrain est d’identifier les écarts présents sur le chantier afin qu’ils soient traités.

Echanger sur les écarts avec les collaborateurs concernés n’est pas la chose la plus facile, mais c’est indispensable pour tirer des bénéfices de vos visite de sécurité terrain et faire progresser votre entreprise et vos collaborateurs.

Indépendamment de l’approche managériale (qui pourrait faire l’objet d’un développement très large !), voici plusieurs consignes pour vous permettre d’avoir la bonne approche.